Tout commence à Nantes, en 1896, quand quelques industriels décident de créer une biscuiterie sur les bords de la Loire. Plus d’un siècle plus tard, le nom de BN (pour Biscuiterie Nantaise) évoque instantanément le célèbre biscuit au sourire chocolaté. De la petite usine artisanale à l’emblème du goûter français, BN a traversé les époques, les guerres et les rachats sans jamais perdre sa saveur d’enfance.
Aux origines de la Biscuiterie Nantaise (1896)
L’histoire de la Biscuiterie Nantaise débute en 1896, au cœur d’une ville alors en plein essor industriel. À cette époque, Nantes profite de sa situation privilégiée sur la Loire, son port actif, ses minoteries et son commerce du sucre en font un territoire propice à l’industrie agroalimentaire. C’est dans ce contexte que quelques commerçants et industriels visionnaires fondent la Biscuiterie Nantaise avec l’ambition de produire à grande échelle des biscuits de qualité destinés au marché national. Rapidement, l’entreprise s’équipe de machines modernes, adopte les procédés de cuisson industriels et s’appuie sur le savoir-faire local pour se démarquer.

La production s’oriente d’abord vers des biscuits nourrissants : secs, robustes, faits pour accompagner les repas quotidiens. Le plus célèbre d’entre eux, le Casse-Croûte, devient vite un classique des foyers modestes. La biscuiterie fait alors partie du quotidien des Nantais. Dans ses ateliers, de nombreuses femmes travaillent à la chaîne et contribuent à la réputation d’excellence de la maison. Avant même la Première Guerre mondiale, la Biscuiterie Nantaise a déjà dépassé les frontières régionales. Ses biscuits circulent dans toute la France et commencent à forger une image d’une entreprise ancrée dans son époque.
La Biscuiterie Nantaise forge son histoire dans les fours de la guerre
Quand la guerre éclate en 1914, les fours de la Biscuiterie Nantaise ne s’éteignent pas. L’usine, comme tant d’autres, se met au service de l’effort national. Les biscuits dorés et sucrés laissent place à un produit plus austère, solide et nourrissant que les soldats surnomment le pain de guerre. Dans les ateliers, les hommes sont partis au front. Ce sont les femmes qui tiennent la production, parfois dans le froid, souvent dans le silence, avec la fierté discrète de celles qui savent que chaque biscuit partira nourrir un soldat quelque part en Europe. La Loire, témoin de cette époque troublée, transporte moins de marchandises et plus de chagrin, mais la ville continue de vivre au rythme des machines.
La France se relève et le BN redevient le compagnon sucré
Lorsque les canons se taisent, la Biscuiterie Nantaise retrouve lentement le goût de la vie civile. Les fours reprennent leur parfum de beurre et de sucre. On répare les machines, on repeint les murs, on recommence à inventer. La France veut oublier la guerre et redécouvrir la douceur. À Nantes, la biscuiterie devient un symbole de cette renaissance, BN modernise ses ateliers, forme de nouveaux ouvriers et s’équipe de chaînes de production plus rapides. On parle de rendement, d’avenir, de progrès. Dans l’air flotte l’idée que tout redevient possible et que les biscuits nantais accompagneront cette nouvelle prospérité.

Au début des années trente, la Biscuiterie Nantaise franchit une nouvelle étape. Les maîtres biscuitiers cherchent à créer un produit différent capable d’unir le croquant du biscuit et la richesse du chocolat. De cette recherche naît un assemblage qui deviendra plus tard le Choco BN, ce mariage de textures et de saveurs crée un produit unique, plus gourmand sans être luxueux. Le biscuit au chocolat séduit rapidement les familles. Son succès dépasse les frontières régionales et fait entrer la marque dans le quotidien des Français. Dans un pays en pleine mutation industrielle, le biscuit nantais devient le compagnon d’une époque qui découvre le plaisir du produit fabriqué en série sans renoncer à la qualité.
Le BN dans toutes les cours d’école
Les Trente Glorieuses ouvrent une période de prospérité et de changement dans les habitudes des familles françaises. L’industrie agroalimentaire se modernise, les supermarchés apparaissent et le goûter devient un véritable rituel. Le BN devient le compagnon du quotidien. Dans les cours d’école, il s’échange, se partage, se compare. Chaque enfant a sa préférence, fraise, vanille ou chocolat et chacun reconnaît son parfum avant même d’ouvrir le paquet.
À la maison, le BN s’invite dans les placards et s’inscrit dans les gestes familiaux. Les mères glissent quelques biscuits dans les cartables, les pères en mangent un avec le café et les grands-parents le sortent comme une récompense du mercredi. À mesure que la télévision s’impose dans les foyers, la marque entre dans la culture populaire.
L’arrivée du sourire et la naissance d’une icône
Au début des années 1990, la marque sent le besoin de se réinventer. Les goûts évoluent, la concurrence s’intensifie et les enfants grandissent avec de nouvelles références. En 1992, le BN change de visage. Le biscuit s’orne d’un sourire gravé dans sa surface dorée, un détail immédiatement reconnaissable. Ce visage joyeux devient son emblème et réaffirme sa proximité avec les enfants.
Dans les années qui suivent, le biscuit au sourire devient un repère, une madeleine de Proust que chacun associe à ses goûters d’enfance. Le succès ne tient pas seulement à la recette, mais à cette capacité de relier les générations autour d’un même plaisir. Derrière ce sourire gravé dans la pâte, c’est toute une époque qui continue de rayonner.
Une marque bousculée par les rachats mais fidèle à ses racines
À partir des années 1990, la Biscuiterie Nantaise entre dans une nouvelle ère. Le marché se mondialise, les grands groupes se disputent les parts de marché et les marques familiales passent entre différentes mains. D’abord intégrée au groupe Danone, elle rejoint ensuite United Biscuits, puis Pladis Global, un ensemble anglo-turc qui gère plusieurs marques internationales. Ces changements d’actionnaires bouleversent la stratégie mais ne remettent pas en cause l’essentiel. L’usine de Vertou aux portes de Nantes continue de produire les biscuits BN pour toute la France. Malgré les restructurations et les plans d’adaptation, le site reste le cœur battant de la marque, fort de son savoir-faire et de son ancrage régional.
BN revendique toujours sa fabrication française. Les équipes de Vertou veillent à maintenir la qualité et ce goût reconnaissable entre tous. Les méthodes ont évolué, les lignes de production se sont modernisées, mais l’esprit d’origine demeure. Le biscuit des Nantais continue de sortir des fours de Loire-Atlantique, symbole d’une industrie qui a su résister à la standardisation.
Le biscuit des Nantais face aux défis du temps
Pour répondre aux attentes actuelles, la marque multiplie les initiatives. Elle crée les Mini BN pour les petites faims, propose des formats individuels plus pratiques et explore des recettes moins sucrées. Le design de l’emballage évolue, mais le sourire reste le même. Chaque nouvelle gamme tente de concilier plaisir et légèreté. Ce virage n’est pas simple à négocier, mais il témoigne d’une volonté de rester une référence du goûter tout en s’adaptant à un public plus exigeant.
Aujourd’hui encore, BN avance entre héritage et modernité. Derrière la simplicité de son biscuit se cache une entreprise qui continue d’expérimenter, d’innover et de défendre sa place sur un marché toujours plus concurentiel. Le sourire du BN est devenu le fil conducteur d’une histoire industrielle qui refuse de s’effacer.